Force de vente
Retail

Quels défis pour les forces de vente de la grande conso en 2025 ?

Visuel Billet défis fdv 2025

En 2022 et 2023, l’inflation et ses conséquences sur la consommation des ménages ont, à juste titre, occupé le devant de la scène. Comme attendu, l’inflation a reflué en 2024 et à partir d’avril, les prix des produits de grande consommation vendus dans la grande distribution ont commencé à baisser. En septembre 2024, la baisse était de – 0,5 % par rapport au mois précédent et de – 0,8 % par rapport à septembre 2023 (Insee). Après une hausse des prix alimentaires de plus de + 20 % en 2 ans, cette diminution ne suffit pas à inverser les comportements des consommateurs qui ont vu leur pouvoir d’achat reculer. Or, en septembre 2024, 65 % des Français estiment avoir perdu du pouvoir d’achat et 82 % se déclarent inquiets des conséquences de l’inflation sur leur foyer, dont 31 % « très inquiets » (Potloc – Alix Partners).

La déflation, pire que l’inflation ?

À défaut d’être significative du point de vue des consommateurs, la baisse des prix est effective et les distributeurs parlent désormais sérieusement de déflation, un véritable fardeau si la consommation ne repart pas à la hausse. Or elle ne repart pas : sur le segment alimentaire PGC-FLS, les volumes sont en recul de – 1,1 % en 2024 (Circana). C’est moins qu’en 2023 (- 3,9 %), mais comme l’évolution en valeur s’établit à zéro pour l’année (contre + 10,1 % en 2023), la situation devient préoccupante pour les propriétaires et gestionnaires de grandes surfaces alimentaires :

« Vous avez simultanément une baisse des volumes et une baisse des prix. Non seulement vous vendez moins cher, mais vous vendez moins de produits. Cela impacte forcément votre haut de bilan. Et comme, sous la topline, vous avez une structure de coûts dont les postes majeurs n’ont pas baissé — la main d’œuvre, l’énergie, etc. – vous avez mécaniquement une fragilisation du compte d’exploitation »

Olivier Dauvers

La baisse des ventes non-alimentaires en GSA (- 3,8 % en valeur en 2024 vs 2023) ne fait qu’aggraver la situation et entériner la diminution de la part de la GSA dans les dépenses courantes des ménages observée depuis 2019. Ce recul se traduit par une perte de chiffre d’affaires de l’ordre de 2,5 milliards par an pour les grandes surfaces alimentaires, une érosion commerciale lente mais inexorable dont les enseignes les moins performantes sont les premières victimes.

« C’est ce que l’on voit jour après jour sur le terrain avec la disparition d’un groupe comme Casino qui, il y a 7 ou 8 ans, pesait encore 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Casino est en train de disparaître à cause des attendus de marché et de problèmes stratégiques. Cela fait longtemps qu’il est le plus mauvais élève de la classe, mais tant que les temps n’étaient pas aussi durs qu’aujourd’hui, il s’en sortait et vivotait. »

Olivier Dauvers

 

2 tendances longues qui pèsent sur la consommation

Après avoir imputé la baisse de la consommation à des causes conjoncturelles comme le COVID puis l’inflation déclenchée par la Guerre en Ukraine, il est temps de regarder en face les tendances longues qui modifient durablement les perspectives d’évolution de la grande consommation :

  • une démographie défavorable, avec – en 2023 — un solde naturel à son plus bas niveau depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, des naissances en recul de 6,6 % par rapport à 2022 et un indice de fécondité à 1,68 enfant par femme, bien en deçà du seuil de renouvellement et au plus bas depuis le pic de 2010 où il était à 2,03 (Insee). Tandis que la fécondité et les naissances déclinent, le nombre de décès diminue et l’espérance de vie repart à la hausse (après l’inflexion de la période COVID), ce qui entraîne mécaniquement un vieillissement de la population. Dans une société où 1 personne sur 5 a plus de 65 ans, la consommation décroît parce que les besoins des individus décroissent, y compris les besoins caloriques. Les dés démographiques étant jetés pour des décennies, rien ne peut à court terme inverser cette tendance qui se vérifie dans tous les pays de l’Union européenne.
  • Une moindre appétence à consommer. En partie imputable au vieillissement de la population, cette tendance s’explique aussi par une forme de désenchantement et de pessimisme quant à l’avenir. Le désir de consommer, l’envie de se faire plaisir en réalisant des achats s’effiloche : en 2024, 35 % des Français expriment un désir très fort/assez fort de consommer, contre 48 % en 2021 (ObSoCo). Cette moindre appétence à consommer s’observe dans toutes les classes d’âge.

De ces tendances, il faut retenir qu’il n’y a plus d’accroissement naturel de la consommation, et ce depuis plus d’une décennie. Si l’on observe des variations positives ou négatives d’une année sur l’autre, l’évolution annuelle moyenne de la consommation de biens des ménages sur la période 2011-2024 est égale à zéro (Insee). Dans ce contexte peu porteur, les acteurs de la distribution alimentaire doivent plus que jamais se battre pour accroître leur part de marché.

Circuits – les gagnants et les perdants

Si le gâteau de la consommation ne grossit plus, certains circuits et certaines enseignes tirent mieux leur épingle du jeu que d’autres. Ainsi en 2024, les seuls circuits à avoir vu leur chiffre d’affaires progresser significativement par rapport à 2023 sont le drive (+ 8%) et les solderies, tirées par l’enseigne Action qui, au cours des 8 premiers mois de l’année, a attiré pas moins de 1,3 million de nouveaux foyers. En revanche, les hypermarchés, supermarchés et SDMP enregistrent une évolution de CA négative, respectivement de – 0,6 %, – 0,3 % et – 1,5 %.

  • Le drive est le circuit à plus fort potentiel de croissance. Avec plus de 7 100 implantations sur le territoire (juillet 2024), le drive totalise un CA de 13 milliards d’euros en 2024. Le nombre d’implantations devrait se stabiliser, mais le circuit est loin d’avoir atteint ses limites en termes de CA. Non seulement il continue à recruter de nouveaux clients, mais il les fidélise fortement. En témoigne la fréquence d’achats, passée de 9,5 en 2020 à 12,8 en 2024, et le bond de 58,4 % du budget annuel dépensé par ces clients dans le circuit sur la même période (Kantar). Pourquoi le drive séduit-il ? Tout simplement parce qu’il constitue une amélioration objective de la proposition de valeur de la grande distribution en offrant au client un service supplémentaire pour le même coût que les courses en magasin. Il en va de même pour la livraison à domicile dont le CA progresse de + 16,3 % en 2024 par rapport à 2023.
  • L’hypermarché et le supermarché ne sont pas morts pour autant ! S’ils perdent lentement leur hégémonie, ils restent les circuits dominants, ceux où l’on vend plus de volume que partout ailleurs.

 

Enseignes – L’impact de la chute de Casino

La reprise des magasins Casino par Intermarché, Auchan et Carrefour bouscule le paysage de la distribution et vient modifier les rapports de force entre les principaux acteurs. C’est particulièrement le cas dans le Sud-Est et les grandes agglomérations qui concentrent 230 des 421 hyper et supermarchés Casino repris par une autre enseigne.

« Théoriquement, ces reprises devraient permettre aux enseignes de destination de consolider leur part de marché dans les anciens bastions de Casino. Mais la concurrence et l’incertitude sur le fait que les clients adhéreront à la nouvelle enseigne rendent la lecture des basculements compliquée. D’autant que plus de la moitié des magasins Casino repris compte déjà un Intermarché et/ou un Carrefour Market dans leur zone de chalandise. »

Vincent Cornu, Retail Services Leader & a3d Managing Director

L’intégration des magasins qui changent de main peut, de plus, être ralentie par les arbitrages de l’autorité de la concurrence. Elle ne se fait pas en un claquement de doigts, même lorsque aucun arbitrage n’est requis. Ainsi, mi-octobre 2024, sur les 294 magasins repris par Intermarché, seulement 7 étaient effectivement repris par un adhérent, les autres étant en portage, une période d’observation pour les repreneurs potentiels qui pourraient se dédire si l’affaire s’avère moins intéressante qu’espérée.

En d’autres termes, ce n’est qu’à la fin de l’année prochaine qu’il sera possible de dire à quelle enseigne les reprises auront le plus bénéficié en termes de part de marché. Fin 2024, le palmarès des enseignes est le suivant :

Remarques :

  • La croissance de 2,3 points de la part de marché de Carrefour est imputable à la reprise des magasins Cora alors que le changement effectif d’enseigne n’a commencé qu’en septembre 2024.
  • La part de marché d’Aldi ne décolle toujours pas, malgré les 547 magasins Leader Price rachetés à Casino en 2020. L’ensemble dépassait alors 4 % du marché. Aldi pèse aujourd’hui moins de 3 %. La faible progression de Lidl, malgré ses investissements en communication, oblige à se demander s’il y a vraiment de la place en France pour 2 enseignes discount, un modèle qui attire peu et qui surtout ne fidélise pas.
  • La dynamique de Leclerc, Intermarché et System U se poursuit. Tous trois progressent de manière endogène, prouvant la force du modèle indépendant. En témoigne l’évolution cumulée de la part de marché de ces 3 acteurs qui est passée de 40,1 % en 2007 à 54,4 % cette année. Leclerc continue à faire la course en tête et confirme également sa position dominante sur le drive (46 % de part de marché) qui représente 19 % de la valeur de ses ventes en 2024.

La dynamique des indépendants et les évolutions en longue période plaident en faveur d’une consolidation du marché autour de 4 acteurs. Si la probabilité que les 3 indépendants fassent partie de ces « Big 4 » est très élevée, il est difficile de dire qui de Carrefour ou d’Auchan sera le 4e. A quelle échéance ? Personne ne s’avance sur ce sujet, mais ce qui est certain c’est que la concentration du secteur va se poursuivre.

Quelles priorités pour votre force de vente en 2025 ?

Vos priorités dépendent largement de vos gammes de produits et du taux de pénétration de votre marque. Mais que vous soyez une marque très installée ou émergente, vous devez nécessairement intégrer les axes suivants dans votre réflexion stratégique :

  • Mettre l’accent sur les indépendants – Votre force de vente a tout à gagner à être très présente chez les indépendants car c’est là que vos chefs de secteur peuvent nouer les relations les plus durables avec les propriétaires de magasin et leurs équipes, surtout s’ils savent démontrer la valeur qu’ils apportent. Cela ne signifie évidemment pas délaisser les autres enseignes, mais peut-être faire l’impasse sur leurs magasins à plus faible potentiel.
  • Avoir une vraie stratégie pour le drive – Même si la tendance du drive est plutôt à la mise en avant des marques distributeur et à la rationalisation des assortiments, ce serait dommage de ne pas miser sur le circuit qui connaît la plus forte croissance.
  • Tenir compte des changements d’enseigne. Le nombre de magasins concernés et le rythme auquel ils sont ou seront effectivement intégrés vous obligent à requestionner votre segmentation et à ajuster les portefeuilles de vos chefs de secteur. C’est d’ailleurs par ce point que nous vous recommandons vivement de commencer.

Pour vous y aider, Nomadia a mis au point une offre spéciale pour la fin de l’année 2024.

Elle vous permet de faire un état des lieux de votre sectorisation et de simuler l’impact des changements d’enseigne sur votre découpage territorial et sur la charge de travail de vos commerciaux. Sur cette base, nous construisons avec vous la sectorisation idéale pour rééquilibrer vos secteurs et optimiser votre performance commerciale globale, que ce soit en ajoutant ou en supprimant des points de vente à suivre, ou en resectorisant les zones géographiques concernées par une surcharge ou une sous-charge de travail.

A partir de ce nouveau découpage, vous pourrez rapidement réajuster votre stratégie pour vous adapter au nouveau paysage de la grande distribution, optimiser votre pression commerciale et vos résultats, tout en veillant au bien-être de vos collaborateurs.

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